La France doit revoir sa politique dans le Caucase
L’historien Maxim Gauin, l’écrivain Gérard Cardonne, le représentant consulaire pour la circonscription Asie centrale et Moyen-Orient, Armand Meimand, l’analyste Antoine Liagre, le cadre commercial Damien Gasneray, le descendant en France du philanthrope azerbaïdjanais Zeynalabdin Tagiyev, Alban Claude, les entrepreneurs Martin Ryan et Serge Bainvel ont écrit une lettre ouverte à Emmanuel Macron publiée vendredi 28 mai dans le magazine d’actualité en ligne Causeur.
“Nous sommes des citoyens français entretenant des liens d’amitié, professionnels ou encore familiaux forts avec l’Azerbaïdjan et son peuple. Certains d’entre nous y résident de façon permanente depuis quelques années et attachent donc une grande importance à la bonne santé des relations franco-azerbaïdjanaises sur tous les plans. D’origines socioprofessionnelles diverses, nous nous efforçons tous, chacun à son niveau, à participer au rayonnement de notre pays et de la francophonie dans cette région du monde”, écrivent les auteurs de la lettre.
Сertains des auteurs de la lettre étaient en Azerbaïdjan pendant le conflit du Haut-Karabakh. Ils soulignent que les arméniens ont visé à plusieurs reprises de façon délibérée des populations civiles situées hors des zones de combats: double bombardement de Gandja, deuxième ville du pays, les 11 et 18 octobre, bombardement de Barda les 27-28 octobre, entraînant la mort d’une centaine de civils, et tentative de bombardement visant la capitale Bakou déjouée au dernier moment le 10 novembre au matin, quelques heures avant la signature de l’accord de cessez-le-feu.
Puis il y a eu une crise diplomatique entre l’Azerbaïdjan et la France. Les auteurs de la lettre évoquent l’article du journal Le Monde “Vexé par le soutien aux Arméniens, Bakou snobe les sociétés françaises” qui “rend parfaitement compte de la situation sur place sur le plan économique notamment.”
Les auteurs soulignent qu’ils étaient des cibles potentielles pour certains groupes radicaux de la diaspora arménienne en France, qui les intimidaient et les menaçaient physiquement. Ils évoquent également les pressions et menaces physiques sur des élus (Jérôme Lambert, député de la 3e circonscription de Charente, Nathalie Goulet sénatrice de l’Orne, ou encore Thierry Mariani, député européen), atteinte à la liberté de la presse (pression sur la chaîne de télévision TF1 suite à la diffusion d’un reportage de Liseron Boudoul sur la ligne de front côté azerbaïdjanais, elle-même menacée de mort), troubles à l’ordre public en plein état d’urgence sanitaire (manifestations régulière à Paris devant l’Ambassade d’Azerbaïdjan en France dès le 27 septembre, blocage de l’autoroute A7 le 28 octobre 2020), agressions de citoyens franco-turcs (agression violente de quatre membres d’une famille d’origine turque, le 25 avril à Saint-Dié-des-Vosges, par un groupe de plus d’une dizaine d’individus).
Les auteurs rappellent quatre résolutions de l’ONU (822, 853, 874 et 884) qui prévoyaient le “retrait immédiat et inconditionnel des forces arméniennes présentes sur le territoire de l’Azerbaïdjan”. “Nous rappelons encore une fois que le Haut-Karabakh et ses sept districts environnants, aujourd’hui libérés, font partie du territoire reconnu internationalement – donc par la France – de la République d’Azerbaïdjan.”
Ils dénoncent le texte voté par le Sénat le 25 novembre 2020 intitulé “Proposition de résolution, portant sur la nécessité de reconnaître la République du Haut-Karabakh”. “Nous prenons évidemment très au sérieux les récentes déclarations du président du Sénat Monsieur Gérard Larcher, évoquant la préparation imminente d’un nouveau texte visant à reconnaître une entité séparatiste sur le territoire azerbaïdjanais, ce qui constituerait une nouvelle provocation et ouvrirait une crise majeure”, notent les signataires de la lettre.
Les auteurs rappellent que lors de la Seconde Guerre mondiale, plusieurs Azerbaïdjanais soviétiques ont été des héros de la Résistance, ayant principalement combattu dans le Maquis de Cabertat, au premier rang desquels un certain Ahmadiyya Jabrayilov hélas pratiquement oublié en France.
Aujourd’hui, à Bakou, il y a un Institut français (IFA) et une université française (UFAZ) qui participent au rayonnement de la France et de la francophonie. De nombreux Azerbaïdjanais sont francophones et francophiles. Beaucoup ont étudié en France.
Sur le plan économique et commercial, des trois pays du Caucase du Sud, l’Azerbaïdjan est le premier partenaire de la France. Plusieurs grandes entreprises françaises dans différents secteurs sont présentes sur place et y sont bien positionnées, notamment Total, Engie, Société Générale, Thales, Schneider, Alstom, CNIM, GDF Suez et Suez Environnement et de nombreuses franchises (Go Sport, Courir, Occitanie, Yves Delorme, Yves Rocher, etc.) et marques dans différents domaines (cosmétique, alimentaire, électroménager, prêt-à-porter, etc.) sont présentes. Une Chambre de Commerce et d’Industrie Azerbaïdjan-France (CCIAF) existe également depuis quelques années.
Le Fonds Heydar Aliyev a alloué des fonds il y a quelques années pour des travaux de restauration d’édifices religieux chrétiens en France, notamment ceux de la Cathédrale de Strasbourg ou encore d’églises du xiie et xive siècle du département de l’Orne.
Les auteurs de la lettre attendent du président des gestes décisifs visant à normaliser les relations franco-azerbaïdjanaises.
https://caucasefrance.com/2021/05/la-france-doit-revoir-sa-politique-dans-le-caucase/